▬ WITHOUT ME.

Ton histoire ? Tu n'aimes pas en parler. Tu n'aimes pas dire ce que tu penses en général.  Ce n'est pas à toi d'en parler, de dire ce qui t'arrache le cœur et l'âme.  Tu te dis que ce n'est pas vraiment ton rôle. Tu dis que ce n'est pas à toi de parler. Là où ta mère souffle prudence, tu choisis un camps, brutalement, douloureusement. Tu goûtes aux excès de pouvoir, à ton statut. Tu épouses les idées sans y croire vraiment. Égoïste, égocentrique, tu navigues en eaux troubles.

Di 7 anni ; le petit con a mal.
« Votre mère a eu un accident de voiture. Elle est morte. » Le gamin s'effondre dans le chaos des premiers chagrins, des premiers assassins de sa vie. Ses mains se crispent sur le jouet, ses ongles éraflant brutalement les plumes de la créature. Il a mal le petit ; maman ne sera plus jamais là. Il fait voler l'hippogriffe au-dessus de sa tête qui se brise, se noyant dans bien des histoires pour oublier la sienne. Les larmes jaillissent, petit dernier de la fratrie, lui n'arrive pas à se retenir. Sa vue se brouille, se noie. Ça lui pique les yeux, mais la douleur n'est rien comparée à celle de son cœur. 'Milo !' La voix de sa mère, elle n'est plus qu'un souvenir lointain, gelé. Elle n'est plus qu'une brise familière qui l'effleure, qui l'agrippe au visage. Il n'entendra plus jamais sa voix non plus. La Mort est odieuse. Une vilaine dame. Elle érafle les souvenirs, scarifie l'organe qui bat. Elle prend, elle vole sans remords pour ne rendre que vide et chagrin. « C'est pas juste ! » Non, rien n'est juste dans la vie, petit Milo. Première leçon que le gamin a apprise. Il ravale alors ses larmes et sa morve. Milo est malheureux, mais il est aussi en colère. Contre tout le monde. Contre ses frères qui ne disent rien, contre sa sœur, et surtout contre son père. L'homme est froid, distant. Annonçant la mort de leur mère de manière stoïque, insensible. Milo ne comprend pas, n'a jamais comprit cet homme qu'il doit appeler 'papa'. « J'te déteste ... » Chuchotis presque inaudible. Personne ne dit rien devant le paternel ; jamais. Or, le sale gamin n'en a toujours fait qu'à sa tête. La colère s’immisce dans ses veines comme un poison. Brutale. Sournoise. Il a mal, trop mal. « J'te déteste ! » Hurla-t-il. Rejetant la main de sa sœur, le petit prit la fuite.

Di 16 anni ; le petit con et sa grande gueule.
« Si une pute tombe enceinte, peut-on appeler ça un accident du travail ? » Le fils indigne observe le paternel ; et si leur regard n'est pas semblable, leur cran vient du même moule pourtant. Le sale gosse n'a pas peur. L'austérité et la froideur lui caressent la peau, mais ne l'atteignent pourtant jamais. Le petit a toujours été ainsi. Envoyant paître ce qui le gêne, s'exprimant à cœur ouvert. Il a le caractère brut, sans futilité, ni retouche. Milo, c'est le mal élevé de l'équipe, celui qu'on a malheureusement raté. C'est celui à qui on tire toujours l'oreille, et pour qui on s'énerve. Il n'est pas du tout comme ses frères, eux, suivant à la lettre les doctrines du paternel. C'est le rebelle. C'est 'le' problème. Pourtant, des coups il en eu. Beaucoup, souvent. Tête dure a le gosse. Il se relève et gueule encore plus. « Bah quoi ? D'habitude, tu m'en colles une parce que je ne m'investis pas assez ! » Milo, il aime se foutre de la gueule de tout le monde, mais surtout de celle de son père. Il a toujours eu un problème avec le paternel, lui, et son business. Pas que ça le dégoûte ou le choc, juste qu'il s'en contre fou. Il ne s'est jamais senti concerné, refilant toutes les responsabilités à ses frères aînés. C'est le luxe d'être le dernier. Ah, il a aussi un problème avec les putes, mais ça, c'est une autre histoire. « Sors de là ! Sors ! » Sourire sournois sur le visage. Milo avait atteint son objectif ! Réussir à écourter l'entretien hebdomadaire. Oui, parce que monsieur Donatello ne faisait pas de réunion de famille comme tout le monde. La progéniture à l'instar des employés avait des entrevues.

Di 20 anni ; le petit con et l'envie de liberté.
L'âge de l'indépendance et de la liberté. Milo a grandi, et le paternel ne peut plus rien dire. Il veut voler loin l'oisillon, quitter le nid, pour ne plus jamais revenir. « J'veux aller à la fac. » Ce n'était pas une question. Milo n'était pas ce genre de petit garçon à demander l'avis de papa pour un oui ou pour un non. Lui, c'était le sale gosse qui faisait les conneries avant, pour se faire allumer ensuite. C'était le môme qui fonçait tête baissée, quitte à renverser mémé sur le palier. Alors voilà, il avait décidé. Si papa était roi, Milo était le prince. Et quand il voulait quelque chose, il l'obtenait toujours. Comme papa. Il a donc pris ses clics et ses clacs, et il est parti rencontrer la tour de Pise. Fatale erreur. Milo a toujours été un peu naïf. Le paternel ne l'a pas retenu, mais ne l'a pas oublié non plus. Deux ans. Il lui a offert deux ans de liberté conditionnelle. Corbeau de malheur qui tambourine contre la porte. Un gros bras tatoué, stéréotype du mafieux des séries télévisées. Alors inutile de lui demander ce qu'il voulait. Il le savait. Milo était peut-être un nigaud, mais point un idiot. « Le patron veut que tu rentres. Tout de suite. » La jouissance s'arrête net. Melchiorre n'est pas là, mais il fait chier quand même. « Putain ... » Deuxième leçon. Le sale môme a retenu deux choses. La première, ce n'est pas parce qu'on ne voit pas le patron, qu'il n'est pas là. Et la deuxième, est qu'il ne faut jamais chercher à énerver le corbeau, car ça fait bobo.

Di 24 anni ; le petit con est en fait marié.
« Espèce de sale p … ! » « Pute. C'est le mot oui, grâce à ton père. » Merde. La vie était parfois étrange. Milo se l'est toujours dit ; comme le jour où on l'a surpris dans le casino des Ucello a compter les cartes, ou encore, quand il a buté un type du clan Verrochio par accident en essayant de remettre le cran de sûreté de son flingue. C'est vrai quoi, combien de chance il y avait pour qu'il puisse signer un contrat de mariage sous les effets de quelques stupéfiants supers douteux ; et ainsi se lier pour l'éternité avec une pute de son père qu'il n'a sûrement pas baisé, parce qu'il était défoncé justement ? « Est-ce que je t'ai … ? » « Non, c'est moi qui t'ai baisé. » Double merde. Une grosse tuile, et le biscuit toujours aussi sec. Bras cassés. Milo n'a jamais été doué comme ses frères ; n'a jamais brillé dans les affaires. Par contre, Milo a toujours été doué pour s'attirer de sacrer emmerdes. Et cette fille l'avait bien eu. Il en garde des souvenirs flous, fugaces. La donzelle lui a promis une soirée extatique, un cours de gymnastique épique. Il a fumé de l'herbe le Milo, il a bu plus que de la menthe à l'eau. Et cette traînée en a profité pour le faire signer. La luciférienne pensait-elle gagner sa liberté de cette manière ? « C'est pas qu'un contrat de mariage qu'on a signé, s'pèce de conne ! C'est notre arrêt de mort ! » N'avait-elle pas compris qu'elle aussi était dans la mouise ? « Putain, je voulais crever dans les bras d'une beauté, au lieu de quoi, je vais être enterré avec une traînée ! » Troisième leçon. Le sale môme le sait maintenant. Les filles de papa sont de vraies salopes.