sourire corrosif (mad)

Le bruit des talons aiguilles raisonnent dans tout le cabinet. On peut entendre le cliquetis des semelles contre le sol qui annoncent l’arrivé de la patronne. Les associés et autres avocat senior  s’empressent de tout régler et finir leurs affaires pour ne pas se faire taper sur les doigts. Mad sait bien qu’elle est effrayante pour ceux qui la côtoient dans le cadre de son travail. Mais elle s’en moque, bien autre contraire, ça a pour seul effet de l’amuser. Elle se joue de l’effet qu’elle a sur les gens. Elle pousse la grande porte en verre et franchis les quelques mètres qui la sépare du petit bureau de son assistant -provisoire- dont elle a déjà oublié le nom. Il s’empresse de se lever en la voyant approcher et tend un gobelet de café latte encore fumant et un dossier rempli de feuilles dactylographiées. Bonjour madame Puccini, voici le dossier que vous m’avez demandé sur le Pro Bono numéro 72. Elle prend le gobelet mais ne se souci pas du dossier que l’assistant lui tien avec un grand sourire accroché aux lèvres, hypocrite. C’est inutile, j’ai réglé ça dans la soirée, nous avons obtenu la somme demandée plus des intérêts et une part a été reversée au capital de la société. Elle est fière, sourit, et lui fait un clin d’oeil. Elle sait bien qu’il a passé la nuit sur le dossier afin qu’elle soit fière de lui, il a certainement fait une nuit blanche et n’a pas mangé depuis un bon moment afin de ne pas perdre de temps. Mais elle s’en moque, complètement. Un regard vers son bureau aux murs de verre lui montre deux hommes assis près de son fauteuil. Froncement de sourcils. Elle déteste les surprises. Qui sont ces hommes, John ? Elle le regarde de manière à lui faire comprendre qu’il aurait dû la prévenir de suite qu’elle avait de la visite, et surtout qu’il n’aurait en aucun cas dû les laisser entrer sans son accord. Elle se promet de renvoyer cet homme dans peu de temps. Il se permet même de la corriger sur son prénom. Jeff. Ils ne m’ont rien dit, ils voulaient savoir si vous aviez réfléchis à leur proposition et veulent s’entretenir avec vous. Ils sont rentrés de force, je n’ai rien pu faire. Renvoyé quand même. Elle comprend qui sont ces gens, elle comprend qu’elle est en danger, et elle comprend qu’elle ne doit pas rentrer. Ils ne l’ont pas vu, ils sont occupés à discuter entre eux, certainement sur la manière de la détruire. Alors elle regarde le petit Jeff. Annulez tous mes rendez-vous de l'après-midi, dites leur que j'ai la grippe chinoise et que je les appellerai demain pour convenir d'un nouveau rendez-vous. Je prend mon après-midi, si quelqu'un me demande, ne donnez pas mon numéro, demandez leur de repasser. Compris ? Elle garde le gobelet latte dans sa main et fait demi-tour. Son coeur bat vite, très vite, elle sait qu'elle doit partir le plus vite possible. En partant, nouveau claquement de ses talons sur le sol. Un des hommes se lève brusquement en la voyant s'en aller.

Elle souffle. Elle court. Elle prend l'escalier n'ayant pas le temps pour l'ascenseur. Le coeur au bord des lèvres qui menace de sauter à tout instant. Ses pensées s'évaporent, son esprit l'abandonne. Elle est seule, livrée à elle-même. Quand elle arrive en bas, le souffle court, ils sont déjà là, à attendre qu'elle tombe dans leur filet. Alors, on veut pas nous voir ? Elle ne peut plus s'enfuir, alors autant garder sa dignité et ne pas faire esclandre. Que me voulez-vous encore ? Elle sait bien ce qu'ils veulent. Qu'elle les rejoigne. Ils sont venus il y a quelque temps pour lui "demander" -ou plutôt ordonner- de rejoindre leurs rangs pour plaider en leurs faveurs dans les affaires délicates. Devenir leur avocate. Mais elle a une réputation, que diront les gens s'ils savent que la grande et populaire Maître Puccini s'amourache d'un gang pareil ? Puis, les affaires de ce genre sont les plus délicates à gagner, il y a souvent des preuves, mais aucun témoin bien évidemment. Alors elle a refusé, sachant que ça ne serait pas terminé, qu'ils reviendraient. Ils voulaient le meilleur pour les défendre, et ils l'auront, coute que coute. Elle croise les bras et fait non de la tête. Un "non" timide, et plein d'une peur qu'elle refuse de leur montrer. Elle sait qu'elle ne pourra pas refuser plus longtemps. L'un d'eux, le plus costaud, lui tend une photographie. Elle la prend, du bout des doigts, comme s'il s'agissait d'un explosif surpuissant. Les traits de son mari apparaissent sur le papier glacé. Elle relève les yeux vers lui, incrédule, sans comprendre. En rentrant, vérifiez s'il est toujours chez vous, ce serait bête qu'il ne revienne jamais à la maison. C'est ce qu'elle craignait, elle en était persuadée qu'ils étaient prêt à tout. Elle n'avait plus le choix, elle savait qu'elle devait accepter. Si elle voulait revoir son mari, si elle voulait garder la vie sauve. Elle les connaissait, elle savait bien qu'elle ne survivrait pas longtemps si elle ne cédait pas immédiatement à leur caprice. Ils ne lui avaient pas fait de mal pour le moment car une fois amochée elle ne pourrait plus comparaître devant le juge, mais cela ne saurait tarder. Alors elle baisse les bras, elle serre la photo dans le creux de sa main, pendant que son souffle se fait plus doux. J'accepte, mais rendez-moi mon mari.

Elle n'a plus jamais vu son mari, elle pense qu'il est mort mais garde encore espoir de le revoir. Ils l'ont tué, elle en est persuadée. Pourtant, ils disent qu'ils lui rendront, qu'ils le gardent seulement pour qu'elle ne fasse rien de compromettant pour eux. Mais finalement, elle aime son travail, et elle reste parmi eux de son plein gré, juste parce qu'elle ne a envie, et parce qu'elle aime le danger qu'ils lui apportent, l'adrénaline. Elle s'est endurcie, elle tient tête, elle n'a plus peur de rien, même pas de la mort. Elle se consacre entièrement à son travail et est toujours au sommet, son nom étant mentionné dans les affaires les plus graves, quand un homme veut se payer le meilleur, il se paie Madilyn Puccini.